30 déc. 2010

VVVVVV

VVVVVV - bannière

Vous avez pu remarquer en lisant ( je l'espère régulièrement ! ) nos papiers que beaucoup de critiques portent sur des platformers, du moins pour ma part. Vous n'aurez pas tort de suggérer de diversifier un peu le tout, pourtant, c'est un sujet tellement vaste que j'ai préféré, alors que GAME !T fait son retour pour célébrer cette fin d'année 2010, de continuer sur un énième platform game. Mais ce n'en est pas un comme les autres. VVVVVV, développé par Terry Cavanagh, est sorti en début d'année et a rencontré un franc succès critique, notamment grâce à une ambiance très rétro, mais surtout parce qu'au lieu d'essayer vainement de surpasser Mario sur son propre terrain, VVVVVV détourne intelligemment la confrontation à l'aide d'un concept nouveau, a priori déroutant.

VVVVVV - captain
Du Fluo et des persos retardés, c'est bien VVVVVV !

Jump in !

Souvent, la qualité d'un platformer est basée sur sa capacité à donner au joueur une emprise telle sur son avatar que toutes fautes viennent à disqualifier le joueur plutôt que le jeu en lui même. Par extension, on a délivré au saut l'essence même du platformer, ce qui faisait que sans lui aucun skill mais surtout aucuns level designs n'étaient possibles.

Ainsi, en basant tout le jeu sur la faculté du saut, la série des Mario Bros donne primauté et naissance à un level design réfléchi, plutôt qu'à l'univers ou au graphisme, ce qui était déjà en soit (et l'est toujours d'une certaine manière) assez avant-gardiste. Pourtant, force est de constater qu'à cause de cela, le platformer s'est mis paradoxalement à tourner en rond depuis des décennies, parce qu'on pensait que tout bon platformer se devait d'être basé sur le saut et que tout autres essais étaient vains. ( Sonic a tenté de contourner le problème par la vitesse, mais une fois l'hérisson au repos, la jouabilité est impardonnable, frustrante.)


VVVVVV - checkpoint
De nombreux checkpoint, au moment les plus corsés.

Et c'est là que réside tout l'intérêt de VVVVVV, car il n'y a pas de saut, seulement la possibilité de se déplacer à droite ou à gauche. En réalité, On traverse les obstacles grâce à la gravité, que l'on changera à notre guise en appuyant sur espace. Ainsi, s'il rejette foncièrement Super Mario Bros ( 1985, NES ) par son absence de saut, il est à peu prés sûr que certains niveaux 2D de Super Mario Galaxy ( 2007, Wii ) aient influencé le game design de VVVVVV. D'une certaine manière, l'avatar de VVVVVV saute, mais indirectement, par le changement de pesanteur.

Note ajoutée après publication ( 23 juillet 2011 ) : La mécanique principale est déjà présente à l'époque tardive de la NES, notamment à travers Metal Storm ( 1991, Irem ), assez impressionnant compte tenu du support.

Bon, et concrètement ?

J'évacue l'aspect musico-visuel : c'est du bon gros chiptune contemporain, composé par Magnus Pålsson : entendre par là des sons autant électroniques que mélodiques, sans recherche d'imitation d'instrument comme il était le cas du chiptune classique. Une 2D simple, neutre, ( quoi que flashy ) dont les couleurs ne dépassent pas quatre nuances. Dans l'ensemble, c'est très propre, lisible et fluide. Encore heureux diront certaines mauvaises langues, à la vue de l'excellente prouesse technique !

La structure dans son level design reprend librement un schéma à la Metroid (1986, NES), à savoir une grande map tout en 2D horizontale, labyrinthique, où sont éparpillées les différentes zones maitresses du jeu. Le but sera de secourir les cinq "crew members" cachés dans ces différents lieux ( Violet, Vitellary, Vermillion, Verdigris, Victoria, d'où le VVVVVV, l'avatar que vous manipulez étant Viridian ). Il n'y a pas de progression linéaire et chacun des lieux peut être découverts dans l'ordre que le joueur choisira, il est vrai parfois à l'improviste, les entrées n'étant pas vraiment signalés.

Intéressons nous maintenant au cœur du jeu. C'est dans ces différentes zones citées plus haut que vous allez passer le plus de temps, et sans doute où vous allez mourir le plus de fois. Jouant donc sur le changement de gravité, VVVVVV recycle cependant beaucoup de ficèles du platformer, mais fusionnées à ce nouveau type de gameplay, ils paraissent neufs, frais.

VVVVVV
oui,  c'est la partie la plus tendue du jeu.


Ainsi, on retrouve tout les poncifs du genre comme des platformes qui slident horizontalement à la Breakout ou qui disparaissent progressivement à leur contact, mais aussi des sols et des plafonds tapissés de pics, des tapis accélérateur/décélérateur, etc... Mais sans saut millimétré, c'est comme devoir écrire de la main gauche pour un droitier, on a l'impression que c'est facile a priori parce qu'on a toujours écrit, mais on souffre à la pratique. Néanmoins, cela ne s'arrête pas à une simple adaptation de vieux pastiches, et même si le jeu est plutôt court, le nombre de petites idées s'enchainent assez rapidement, si bien qu'on passe de l'une à l'autre sans pour autant s' habituer à la première. 

Pas parfait ? Oui, mais pour le meilleur.

On se rend vite compte que même si le concept s'adapte parfaitement au platformer, il trouve rapidement ses limites : pas de boss, pas d'ennemi à proprement parler ( on les évite comme des obstacles ) car la jouabilité ne le permet tout simplement pas. VVVVVV fait partie de ces boites à idées qui se risque à s'affranchir de beaucoup de principes pour proposer quelque chose de nouveau. C'est gagné.

Ce contraste entre une ambiance rétrograde, parodique des mascottes et des structures narratives des années 80, et un concept qui donne une sacrée droite à tout un pan du platform gaming fait de VVVVVV un jeu remarquable en ce qu'il constitue une avancée relative dans le platformer, un des plus vieux chêne vidéoludique, mais d'où fleurissent toujours régulièrement quelques bourgeons ( le récent Super Meat Boy, le déjà critiqué Kirby's Epic Yarn ), ce qui ne manque pas de forcer l'optimisme pour l'avenir.

Willy Fox

Les liens utiles :
  •  Le site officiel du jeu ( le jeu est à 5 euros, et flingué de 50% pour Noël, pourquoi attendre? )
  •  La démo des deux premiers niveaux en Flash ( comment ça vous ne l'avez pas déjà acheté? )

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