13 oct. 2010

Sleep Is Death


Sleep is Death
Jason Rohrer est un créateur atypique dans le monde très conventionné du jeu vidéo. Refusant de  considérer ce dernier comme exclusivement divertissant, il torture le joueur dans le très cérébral puzzle game Between, en 2007. La même année, Passage marque la montée de la popularité du game designer sur internet, inutile et pompeux pour certain, sensible et génial pour d'autre mais toujours caractérisé par un minimalisme forcé. Paradoxalement, il s'attaque avec Sleep Is Death en 2010, au genre très complexe du rpg...







Mais c'est quoi cette bouillie de pixel ?



Comment inaugurer de plus belle manière cette section de créations indépendantes avec Jason Rohrer ? Écologiste radical et adepte de la simplicité volontaire, il développe tout seul chez lui (c'est son seul travail), et est un défenseur de l'open source.

Il est facile de comprendre en connaissant les convictions du bonhomme pourquoi Sleep Is Death fait l'état d'une économie de moyen visuel, enrichi aux bons gros pixels, qui ne sont donc pas qu'une simple lubie rétrograde. Après quelques réglages, une interface apparait, aussi incompréhensible que l'histoire de la Gaule sous méthamphétamine. Et ça ne fait que commencer...
 


Sleep is Death - L'interface du jeu
Pas si compliqué qu'il n'y paraît...

"A two-player storytelling game. Available now"

Pour faire court, Sleep Is Death est un rpg conventionnel mais transposé pour le micro. Jusque là tout va bien, le joueur 1 est l'unique protagoniste réel qui est balancé dans un monde modifiable par le joueur 2, le maitre du jeu virtuel. Une palette riche s'offre à ce dernier pour faire vivre à notre jeune Ulysse son Odyssée. Musique 8 bit composable in-game, phylactères, sprites et décors pré-enregistrés, le jeu de base offre une souplesse rarement atteinte dans le milieu.

VIVA LA LIBERTAD

Cependant, cette (trop grande?) liberté est acquise au prix d'un problème équivalent à son homologue papier : le jeu sera aussi mauvais que le joueur d'en face. De plus, le temps d'adaptation avant d'avoir une fluidité dans la narration peut se révéler laborieux. Pire encore, qu'elle est utilité d'un tel jeu - la performance évidente en tant que game designer mise de coté - s'il ne fait que proposer une expérience déjà présente dans un autre domaine, la convivialité en moins?

Et avec l'Interwebz?

On se doute bien que cette réflexion s'est déjà promenée plus d'une fois dans la tête du designer, et la direction exclusivement online du titre n'est pas anodine : On garde l'avantage du meneur de jeu (une IA bourrée aux hormones) tout en gommant sa présence. On a la vague impression d'être devant un super ordinateur qui a toute l'emprise sur vous.




La solitude est un thème récurrent et déjà présent dans Between, où l'impossibilité de converser - les deux joueurs ne se voient qu'indirectement à travers l'avancée respective de leur tour colorée - rend la pratique du jeu anxieuse et pénible. À l'image d'un Goichi Suda (No More Heroes - 2007), Jason Rohrer semble faire partie de cette race de designer qui ne sont pas soumis aux exigences, à la patience et au sacro-saint 'fun' imploré par les hardcore gamer.









Passe moi ton gros pixel...
(haut) refonte visuelle

Cette infinité d'univers, une fois utilisée de façon naturelle s'entend, peut se révéler un bon compromis entre le rpg papier et la 3D linéaire d'aujourd'hui qui n'admet aucune marge d'imagination : ce qui fait la force d'un visuel 8/16 bit, c'est sa capacité à ne pas représenter parfaitement les environnements et à faire travailler l'imagination.

Artiste ou fumiste ?


Pourtant, le créateur et très peu présent dans Sleep Is Death : pas de narration et de mise en scène (cela va de soi), et l'aspect, quoi que volontaire, est rudimentaire. Il laisse donc tout à faire aux joueurs et est donc dépendant de sa communauté. Il existe déjà nombre de re-travail visuel visant à enrichir et développer le jeu sur le long terme...


En guise d'épilogue...
 
Un manque de travail? Jason Rohrer n'a développé que le moteur du jeu mais il a déjà tout fait. Ce dernier EST sa vision du jeu. Simplicité.

 
"J’ai appris qu’un jeu n’a pas besoin d’être compliqué ou long pour avoir un impact puissant sur les gens. En fait, il semble que plus c’est simple, meilleur c’est."


Jason Rohrer à propos de Passage - février 2008




Les liens utiles (en anglais)  :

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